Ortie dioïque

L’Ortie, cette bonne mal-aimée

L’ortie, cette dame au caractère urticant, est souvent perçue comme une indésirable envahissant nos jardins. Liée à l’homme depuis toujours, elle recèle pourtant de nombreuses vertus, contrairement à ce que l’on peut penser.

Portrait de famille

Les plantes que l’on nomme Ortie sont des Urticacées, famille comprenant plus de 2 600 espèces réparties dans une soixantaines de genre. La plupart de ces espèces sont des plantes herbacées, certaines sont des arbustes, des arbres ou des lianes.

Parmi les espèces rencontrées en France seules trois d’entre elles sont reconnues pour leurs propriétés médicinales :

  • L‘Ortie à pilules ou Ortie romaine (Urtica pilulifera) se rencontrant surtout dans les ruines du Midi, du Centre et du Nord-Ouest était autrefois cultivée.
  • L’Ortie dioïque ou Grande ortie (Urtica dioica) mesurant jusqu’à 1,50 m, nécessitant deux plantes sexuées pour se reproduire, se développant aussi par rhizomes.
  • L’Ortie brûlante ou Petite ortie (Urtica urens) ne dépassant guère les 70 centimètres, produisant de nombreuses graines. Très urticante.

L’Ortie dioïque étant la plus courante, je vais m’attarder sur sa description.

C’est une plante élancée à tige quadrangulaire et à feuilles opposées. Son feuillage dentelé est garni de nombreux poils urticants relâchant un mélange d’acide formique et de carbonate d’ammonium ainsi que des neuromédiateurs. La densité de ces poils augmente chez les plantes broutées par les herbivores ou soumises à des agressions mécaniques. Les orties des sous-bois ont moins de piquants car elles sont moins exposées et donc moins agressées.
Les fleurs en grappes ou en boulettes sont de couleur verdâtre. Comme c’est une espèce dioïque, les fleurs mâles et femelles sont sur des pieds différents. Les fleurs femelles sont verdâtres et pendantes, elles donnent naissance à un fruit: l’akène. Les fleurs mâles sont jaunâtres, étalées ou dressées.

Les orties poussent en touffes épaisses sur les sols meubles, riches en azote et en fer en marge de nos potagers et de nos routes. Ses racines jaunâtres sont très traçantes et peuvent être parfois très épaisses.
Préférant les sols humides pour son implantation, l’ortie supporte bien la sécheresse par la suite.

Ortie et biodiversité

Pour peu que l’on prenne le temps d’observer ce qu’il se passe dans un îlot d’orties, nous pouvons nous apercevoir que nous avons affaire à un espace remarquable de biodiversité. En effet, l’ortie abrite plus d’une centaines d’espèces d’insectes ainsi que de nombreux oiseaux et mammifères.

L’Ortie et les insectes

Plus d’une centaine d’insectes sont liés à l’ortie. Certains le sont pour leur unique ressources de nutrition ou pour la croissance de leurs larves. On dit qu’ils sont inféodés à l’ortie. D’ailleurs, beaucoup d’entre-eux ont un nom comportant le nom de la plante hôte. Par exemple : le Charançon de l’Ortie pour le nom commun ou Aglais urticae, la Petite tortue pour le nom scientifique.

Charançon de l’ortie (Phyllobius pomaceus)

Parmi les papillons emblématiques de l’ortie, nous y rencontrons le Vulcain, la Petite tortue, la Belle dame, le Robert le Diable, la Carte géographique, l’Ecaille-martre, etc. Leurs chenilles se nourrissent exclusivement, pour la plupart, de feuilles d’ortie comme, ci-contre, celles du Paon du jour (Aglais io).
Nous y trouvons aussi de nombreuses autres espèces d’insectes comme les pucerons ainsi que leurs prédateurs par excellence que sont les coccinelles et les chrysopes.

L’Ortie abri et garde-manger

De nombreux oiseaux insectivores ou granivores passent régulièrement par les massifs d’ortie comme les mésanges, fauvettes, moineaux et bouvreuils. Certains couples y installent même leur nid.

Moins visibles, surtout en journée, de nombreux mammifères viennent se nourrir ou se cacher dans ces massifs protecteurs. Certains viennent aussi s’y installer afin d’élever sa progéniture.
Peut-être auriez-vous la chance d’y rencontrer un hérisson à la recherche de limaces et d’escargots ou une belette à la chasse au campagnol ?

L’ortie compagne de l’homme à travers les siècles

Récoltée depuis nos ancêtres chasseurs-cueilleurs qui l’utilisaient dans leur alimentation, l’ortie est reconnue depuis l’antiquité pour ses qualités médicinales et vestimentaires.

Au premier siècle, Dioscoride la préconisait non seulement dans la préparation de nombreux plats et la considérait aussi comme un puissant aphrodisiaque. Il avait aussi remarqué l’effet pectoral de ses graines mélangées dans du miel, ainsi que les facultés diurétiques, laxatives et emménagogues des décoctions de feuilles. Il conseillait aussi les cataplasmes de feuilles écrasées contre les morsures, plaies gangreneuses et ulcères, indications aujourd’hui vérifiées et expliquées scientifiquement.

Depuis l’antiquité, aussi, l’ortie semblait posséder une aura magique. En effet, les valeureux guerriers faisaient bénir leurs épées afin de terrasser les démons personnifiés par leurs ennemis, mais aussi les paysans affûtaient leurs outils avec ses branches afin de s’assurer de bonnes récoltes.

Dès le seizième siècle, son utilisation devient industrielle, notamment pour la fabrication de papier, cordes, draps, filets de pêche, voiles et teintures.

Tombée dans l’oubli, l’Ortie est redécouverte au dix-neuvième siècle pour ses vertus médicinales encore étudiées jusqu’à nos jours.

L’ortie aliment

Les jeunes pousses et les feuilles tendres de l’ortie sont un ingrédient de choix pour les potages, crêpes, omelettes et autres mets. Ses apports en protéines et en oligo-éléments en feront un bon reconstituant dans l’alimentation végétarienne. L’ortie peut, aussi, remplacer le houblon dans la fabrication de la bière.

Dans l’alimentation animale, principalement pour les bovins, l’ortie est galactogène . Qui rend le lait plus riche en matière grasse ainsi qu’en acide oléique.

Dans l’industrie agroalimentaire, sa chlorophylle est extraite pour préparer des colorants verts tels que le E140.

L’ortie médicament

En usage externe, on la préconise en teinture ou en compresse pour traiter les plaies ou blessures, pour les brûlures.
Sous forme de décoctions, l’ortie peut être utilisée pour les soins du cuir chevelu notamment pour les cheveux fragiles et cassants.
Pour les soins buccaux, l’ortie est conseillée contre les aphtes et autres infections.

En usage interne, tonique général, elle peut être régulièrement prise en cure. Antianémique, elle revitalise tout le corps, aide à lutter contre la fatigue, régularise le sommeil, améliore l’attention intellectuelle.
Une infusion de feuilles et de racines bue à volonté s’avère antirhumatismale et dépurative.

La racine ou la plante entière sont indiquées dans les affections du tube digestif et de l’appareil respiratoire. Le sirop d’orties se montre efficace contre les divers problèmes pulmonaires.
Les graines sont utilisées pour l’énurésie, notamment pour les enfants.

Les feuilles contiennent une dizaine de vitamines, de nombreux sels minéraux et oligo-éléments ainsi que divers acides-alcool, des coumarines, des flavonoïdes, des enzymes, des tanins, des glycoprotéines. A cela, nous pouvons ajouter la présence de 8 acides aminés essentiels pour l’organisme.
Les fruits nous offrent des protéines, une forte proportion d’acide linoléique, d’huile grasse, de caroténoïdes ainsi que de la vitamine E.

L’ortie au jardin

Coupée avant sa floraison, elle a un effet régulateur sur l’azote et le fer contenus dans la terre, fortifie les micro-organismes du sol et stimule la croissante des plantes. Ainsi, de nombreux jardiniers bannissant les engrais chimiques ajoutent quelques poignées de feuilles d’ortie hachées dans le fond des trous de plantation et glissent des brassées d’orties au milieu du compost pour l’activer.
Connu depuis des siècles le purin d’ortie est un stimulant particulièrement bénéfique dans les terres calcaires et pour de nombreux légumes. De plus c’est un fongicide et un prébiotique naturel pour les plantes.

En conclusion, je reprendrai donc une citation de Victor Hugo vantant les caractéristiques de cette plante encore ignorée.
« Si seulement la population connaissait ses multiples usages jeune, l’ortie constitue un excellent légume nourrissant, adulte, ses figes offrent des fibres qui donnent une étoffe très résistante. Chez les animaux, elle fait pondre les poules, rend les vaches plus fertiles et fait briller le poil des chevaux. Décidément, l’ortie offre beaucoup pour le peu qu’elle demande ! »

Avertissement
En aucun cas les informations et conseils proposés sur le site Place de la nature ne sont susceptibles de se substituer à une consultation ou un diagnostic formulé par un médecin ou un professionnel de santé, seuls en mesure d’évaluer adéquatement votre état de santé.

Article et photographies : Cédric Daguet

Sources :
Phytothérapie, Dr J. Valnet
Les Secrets de l’Ortie, Bernard Bertrand, Éditions Terran
http://urticamania.over-blog.com/article-l-ortie-vue-par-une-herboriste-52619282.html
http://urticamania.over-blog.com/

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